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La Paroisse
Rappel à Dieu de Maïte LAVIGNE
Rappel à Dieu de Maïte LAVIGNE
© ND Bidassoa

| LAVIGNE 2009 mots

Rappel à Dieu de Maïte LAVIGNE

Mercredi dernier, 12 juillet, nous avons célébré les obsèques de Madame Maite LAVIGNE, la maman de notre curé, l'abbé Jean-Marc.

La célébration se passait à l'église d'Hasparren, ville natale de la famille.

Jean-Marc remercie toutes celles et tous ceux qui se sont manifestés à cette occasion. Il est très reconnaissant de cette vague d'amitié et de prière qui a recouvert sa peine et celle de sa famille via des messages téléphonique, des lettres, des mails et facebook...

En signe de reconnaissance, voici le partage de deux textes importants lus lors de la messe : celui de Marie-Hélène, la fille de Maite et l'homélie de Jean-Marc, le fils.

Marie Hélène LAVIGNE, au moment de l’accueil

Je suis Marie Hélène, la fille de Maité et mon frère m’a demandé de prendre la parole. Je n’ai pas l’habitude de cet exercice et dévoiler ce qui m’est de plus personnel, gérer l’émotion, risque d’être difficile. Mais qui peut parler mieux d’une mère que sa fille ?

Je tiens tout d’abord à tous vous remercier d’être là, de partager ce moment, de partager le dernier voyage de Maïté.  Je remercie tout particulièrement ma famille, mes amis, le personnel de la maison de retraite qui l’a accompagnée durant ces longues années, et Mademoiselle Annie avec qui j’ai partagé mes premières gammes et qui m’a fait le plaisir de mettre cette messe en musique. Je remercie aussi mes enfants, Julie qui a été présente à l’hôpital durant les dernières heures de la vie de maman, qui l’a rassurée et qui a pris en charge toutes les démarches durant notre absence, Tiphaine ma fille ainée qui est arrivée d’Australie hier et qui n’a pas hésité à faire ce long voyage pour nous rejoindre, et Quentin qui est en Nouvelle Zélande, qui n’a pas pu se libérer mais qui est avec nous en ce moment, par la pensée.

Je vais commencer par vous lire un texte amérindien, je vais essayer de parler comme mon frère, lentement pour que vous me compreniez bien. Ecoutez bien.

Un vieil indien explique à son petit-fils que chacun de nous a en lui deux loups qui se livrent bataille.

Le premier loup représente la sérénité, l’amour et la gentillesse.

Le second loup représente la peur, l’avidité et la haine.

« Lequel des deux loups gagne ? » demande l’enfant

« Celui que l’on nourrit » répond le grand père.

Maman n’a rien fait d’extraordinaire ni de notable dans sa vie, elle n’avait pas la vie publique de mon père, elle œuvrait dans l’ombre mais je crois que toute sa vie, de son enfance à sa mort, elle a nourri le loup en elle qui représente la sérénité, l’amour et la gentillesse. Le second loup n’a jamais pu pointer le bout de son nez.

Quand on perd sa maman, quel que soit notre âge, c’est l’enfant en nous qui rejaillit et les souvenirs. Quand je pense à maman, j’ai en mémoire sa petite silhouette ronde, ses bras et ses joues potelées que j’adorais embrasser, la douceur de sa peau, la chaleur de son sourire et l’éclat de son rire quand elle se laissait aller.

Douceur, chaleur, gentillesse, amour, je ne retiendrai que ces mots. Je crois que tout le monde sera d’accord ici, elle n’a jamais eu de parole ni d’acte de méchanceté envers personne. Elle trouvait toujours à chaque situation difficile une phrase du style « mais regarde ailleurs, tu n’as pas à te plaindre, au contraire ! » et elle trouvait toujours une excuse à toute personne qui lui avait fait du mal ou qui avait un mauvais comportement. Elle voyait toujours cette once de bonté en chacun, cette lumière divine.

Cela avait le don de m’exaspérer, surtout à l’adolescence, cet âge où on est dans la colère et la rébellion. Je la trouvais trop naïve, pas assez battante, je ne voulais surtout pas lui ressembler. Je préférais la lutte et l’action. Aujourd’hui j’ai grandi, j’ai vieilli, ma vie a évolué et je comprends ce qu’elle voulait dire. Je m’efforce moi aussi de voir en chacun cette étincelle divine, je lutte contre la médisance, la méchanceté gratuite et je suis aujourd’hui fière de lui ressembler, d’être dans cette bonté, cette gentillesse, qui fait naitre les sourires autour de soi.

Maman a donné toute sa vie aux autres, elle a toujours tout fait pour que son entourage se sente bien, elle était généreuse, on ne pouvait pas aller à Bayonne sans qu’elle donne une pièce à tous les clochards qu’elle rencontrait, sa porte était toujours ouverte aux plus nécessiteux. Elle avait la générosité des gens qui n’ont rien.

Sa sœur Alice disait toujours qu’elle était une sainte, je n’irais pas jusque-là mais elle avait cette douceur, cette abnégation, ce don aux autres.

Pourtant, la vie a été dure avec elle, elle a connu la maladie et le pire, la perte de la communication. Elle qui était si bavarde ne pouvait plus exprimer les mots qui se bousculaient dans sa tête. Je crois qu’elle n’a jamais compris ce qui lui était arrivé, peut-être même jamais accepté et ce long calvaire a duré 20 ans.

Et pourtant, même dans cet état, elle a su exprimer sa gentillesse et sa bonté. Elle a remplacé le langage oral par le langage corporel. Les mots sont devenus caresses, étreintes, baisers, sourires. Elle a su garder le lien même avec ses petits enfants qui ne manquaient jamais d’aller la voir, même à l’âge adulte, même s’il n’y avait pas grand-chose à dire, juste être là, lui tenir la main.

Elle est partie goxoki comme elle avait toujours vécu, sans faire de bruit.

Nous avons la chance, mon frère et moi, de n’avoir hérité de nos parents d’aucun bien matériel, juste des beaux souvenirs et surtout cet amour immense qu’ils nous ont légué, chacun à leur tour et qui s’est amassé. On dit que la perte d’un proche nous laisse un vide, moi je crois au contraire qu’elle nous remplit, elle nous remplit à en déborder de cet amour supplémentaire dont on hérite et j’espère que nous en serons dignes, que nous saurons faire de nos vies quelque chose de beau, de généreux, de riche, et que nos enfants en hériteront de même.

Je me suis personnellement éloignée de la religion catholique, mais aujourd’hui j’aimerais vraiment que le paradis auquel vous croyez existe, pour que maman, après cette longue attente, puisse rejoindre papa et qu’ils vivent leur amour pour l’éternité. Mais je sais au fond de moi que c’est déjà fait et qu’ils veillent sur nous.

Pour terminer, j’aimerais vraiment que ce dernier hommage à maman ne se fasse pas dans la peine mais dans la joie, la joie d’une vie qui a été belle et qui se poursuit au-delà et en nous.

 

Jean-Marc LAVIGNE, homélie

Mes amis, j’ai laissé les premiers mots à ma sœur, Marie-Hélène, il est temps que je vous parle à mon tour… là, frangine, tu écoutes ton frérot, le curé… c’est pas souvent…

          Oui, mes amis, par chance ou par grâce, avec ma sœur et mes neveux, nous n’avons pas à gérer une écrasante tristesse alors même que nous perdons la personne la plus importante de notre vie, notre maman, notre mamie.

          Elle avait atteint le bel âge de 92 ans ; et les 20 dernières années de sa vie furent tellement amputées de l’essentiel, la communication suite à un AVC, que, raisonnablement, nous accueillons son dernier soupir comme un cadeau de la vie, communément on parle de délivrance.

Ceci dit, il me plait de relire la vie de Maite, de maman, à la lumière de la page d’évangile que nous venons d’entendre.

          Et ceci en trois directions :

          = Moi aussi, nous aussi, nous rendons grâce avec Jésus de ce que le Seigneur a révélé à notre mère et grand-mère : il lui a révélé la joie de croire, la joie d’aimer, la joie de rester simple et vraie. « Père je proclame ta louange, tu te révèles aujourd’hui encore aux petits, comme l’était Maite dont la grandeur était celui du cœur et la richesse celle de la douceur. Pas de promotion professionnelle et sociale à l’horizon : une vie digne de travailleuse d’abord placée à Orthez puis à Bayonne et ensuite à l’usine Madré comme tant d’Hazpandars d’humble condition ouvrière. Et bien sûr, et ce n’est pas rien, une vie familiale d’épouse et de mère et de grand-mère, de tante et de cousine, tout ordinaire… enfin une paroissienne naturellement au service de la catéchèse, de la chorale, de l’ACGF… Bref, la vie est un trésor pour les petits qui se laissent toucher par Dieu. Loué sois-tu, Seigneur.

          = Et puis cet appel que le Seigneur n’a cessé de murmurer à notre maman : « Viens à moi, toi qui peines sous le poids du fardeau, et moi, je te procurerai le repos ». Oui, lourd a été le poids de son corps devenu prison… mais derrière ces barreaux nous aimions capter son beau sourire aux yeux pétillants d’amour et d’humour. Merci à celles et à ceux qui ont visité Maite à la Maison de retraite et qui aimaient passer un peu de temps avec elle, simplement, dans une affection réciproque. Vous étiez les envoyés du Seigneur pour procurer à notre mère le repos du corps, car vous allégiez son fardeau ; elle s’illuminait avec et grâce à vous. Loué sois-tu, Seigneur.

          = Enfin, le Seigneur va plus loin encore dans sa proximité avec les souffrants quels qu’ils soient : il ose les charger d’un fardeau supplémentaire en leur disant : « prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur ».

Paroles insupportables apparemment pour quelqu’un qui souffre déjà trop.

Il est vrai que j’ai vu maman, les premiers mois de son handicap, refuser de prier, montrant aussi le ciel avec un poing rageur. J’en ai été très choqué d’ailleurs. « Enfin maman ! »

Mais assez vite, aidée par la présence aimante de papa, et la prière quotidienne avec lui, elle a retrouvé la paix. « Je vous procurerai le repos ».

          Ce joug du Seigneur jeté sur les épaules de maman, c’était le doux attelage que le Christ a formé avec elle. Tous les deux, comme un seul homme, ils ont porté la souffrance et la croix. Tous les deux, la femme et son Dieu, sont parvenus au bout du champ déchirant la terre aride avec le soc de la persévérance chevillée au corps pour qu’en jaillisse petit à petit et finalement s’embellisse la fleur de la foi, de la confiance, de l’abandon, de la paix.

          J’ai eu la joie et le privilège d’arroser ce sillon tous les dimanches quand chaque grain du chapelet partagé avec maman tombait dans son champ. Et que la Vierge Marie veillait et priait pour nous pauvres pêcheurs.

          Chaque grain de « Je vous salue » était une petite victoire car, là, maman retrouvait la parole, les mots de la prière brisaient l’isolement et le silence. Merci à l’abbé Jean Arrayet qui m’avait suggéré de prier ainsi avec ma mère, m’invitant à prendre le relais de mon père décédé pour que maman fasse fleurir encore son champ.

Alors oui, nous pouvons avoir l’audace de prendre pour nous, pour elle ces paroles de Jésus : « Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau léger. »

Loué sois-tu, Seigneur.

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          Mais il fallait aussi que cela cesse ici-bas. Cela est fait. Nous sommes raisonnablement dans la paix.

          Maintenant, Maman est accueillie au ciel par celui qui se définit comme « doux et humble de cœur ; en qui nous trouvons le repos de l’âme » : Jésus, le Christ ressuscité. Voilà tout est dit : le corps s’en ira dans la terre ; l’âme ou le plus beau et le plus vrai de maman, ne pourra plus mourir mais se développera encore et encore jusqu’à nous rejoindre de nouveau, mystérieusement, pour nous rendre plus forts, plus vrais, plus beaux, plus rayonnants d’amour, plus croyants.

          Merci maman : tu resteras une parabole pour nous, un appel à vivre comme toi les heures les plus sombres. Mais surtout comme toi avec le Christ.

Jesusekin, esperantzan beti xut ! eta beti aintzina !

                                                                                                  Amen

 

 

 

Le jour de l'ordination de son fils, notre Curé, l'abbé Jean-Marc
Le jour de l'ordination de son fils, notre Curé, l'abbé Jean-Marc © ND Bidassoa
Le jour de l'ordination de son fils, notre Curé, l'abbé Jean-Marc
L'abbé Jean-Marc avec son père, Emile, son amatxi et Maïté, sa maman.
L'abbé Jean-Marc avec son père, Emile, son amatxi et Maïté, sa maman. © ND Bidassoa
L'abbé Jean-Marc avec son père, Emile, son amatxi et Maïté, sa maman.
L'abbé Jean-Marc avec sa petite soeur, Marie-Hélène.
L'abbé Jean-Marc avec sa petite soeur, Marie-Hélène. © ND Bidassoa
L'abbé Jean-Marc avec sa petite soeur, Marie-Hélène.

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