TROISIEME DIMANCHE DE L’AVENT B
Puis-je vous faire rire deux secondes : « Il n’est pas facile pour un homme de porter sur soi du rose. »
Or c’est le cas aujourd’hui pour moi, comme pour tous les prêtres (si du moins ils ont acheté un tel ornement) car c’est le troisième dimanche de l’Avent ; le dimanche de la JOIE.
Alors nous quittons, le temps d’un dimanche, la couleur liturgique violette, couleur dure, pour la couleur liturgique rose, couleur douce.
C’est le dimanche de la JOIE, qu’on appelle aussi le GAUDETE parce que l’antienne, les tous premiers mots que je lisais en début de la messe étaient : « Soyez dans la joie du Seigneur. Soyez toujours dans la joie, le Seigneur est proche ».
On le chantait en latin, avec ces paroles qui commencent donc par GAUDETE : « Gaudete in Domino semper : iterum dico, gaudete ! »
Et pour goûter cette JOIE les lectures de ce dimanche nous en donnent le ton et la couleur :
= Isaïe disait : « Je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu » ;
= La Vierge Marie lui répondait en place du psaume : « Mon âme exalte le Seigneur… Le puissant fit pour moi des merveilles » ;
= Saint Paul exhortait : « Frères soyez toujours dans la joie » ;
= Le tout couronné par la figure de Jean le Baptiste décrite ici, par Jean l’évangéliste, comme : « un homme envoyé par Dieu… venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière » La lumière c’est la joie !
Noël, le Christ qui vient : voilà la cause de la joie des chrétiens que nous sommes.
Mais quelle est cette joie ? Et peut-on parler de joie aujourd’hui au cœur de notre monde ?
Nombreux sont ceux qui, autour de nous, et peut-être même parmi nos proches, considèrent l'espérance chrétienne, l’optimisme chrétien, comme une douce illusion.
Pire encore, ils ne perçoivent dans le message de l'Ecriture et de l'Eglise qu'une série d'interdits, de mises en garde, de recommandations morales.
Et puis, et c'est hélas la réalité, des conflits endeuillent tous les jours notre planète ; les problèmes sanitaires, économiques et écologiques condamnent beaucoup de nos contemporains à une vie bien difficile et cela ne date pas d'hier.
Comment alors pouvons-nous être dans la joie ?
La joie, en tant qu'émotion profonde, ravissement, enchantement passager, est accessible à tous ! Regardez la joie qui éclaire les yeux des parents qui regardent leur enfant faire ses premiers pas... La joie pour un malade de quitter l'hôpital et d'apprendre de son médecin qu'il est guéri... La joie du jeune garçon ou de la jeune fille qui vient d'apprendre sa réussite à un examen... La joie des parents et grands-parents à l'idée de recevoir à Noël leurs enfants et leurs petits-enfants (quoique avec prudence cette année).
Mais lorsque les journées sont porteuses de mauvaises nouvelles, ou qu'elles s’étirent dans la monotonie, il est difficile de se montrer joyeux. Et d’une façon générale, lorsque nous sommes accaparés par les soucis et les activités incessantes, il est difficile d'être vraiment dans la paix et dans la joie.
La joie chrétienne est bien plus qu'une émotion passagère. C’est une joie profonde et constante qui peut cohabiter avec des épreuves.
Parce que la joie chrétienne est un don de l’Esprit qu’il nous faut maintenir bien vive. « N’éteignez pas l’Esprit. » nous dit St Paul dans la seconde lecture.
Cette joie vient donc d’une source profonde, de Dieu lui-même.
Aujourd’hui, nous pouvons déjà anticiper, un instant, le texte d’évangile de la nuit de Noël. Quand Dieu s’adresse par son ange aux bergers, il révèle pour toujours, pour toute la terre et pour tous les cœurs :
« Je vous annonce une grande joie, qui sera celle de tout le peuple ; aujourd’hui vous est né un sauveur…»
La joie vient dans le monde par la naissance du Fils de Dieu qui désormais est notre compagnon de route. Dieu marche avec nous. Quelque soit notre chemin (facile, glissant, pentu, scabreux, plein d’ornières) toujours le Christ Jésus nous prend par la main et nous soutient sur ce chemin. Il est Dieu-parmi-nous Emmanuel.
C’est là notre joie profonde et durable.
Aujourd’hui, à deux semaines de Noël, nous devons nous en réjouir, entrer dans la joie de découvrir encore mieux cette année le visage aimant de Dieu dans la crèche de nos cœurs, de nos vies.
Finalement, c’est une question de foi ! Dieu n’est pas un magicien ou un diseur de bonne aventure ; Dieu est un Père qui prend soin de tous ses enfants et qui leur donne la JOIE en leur donnant son Fils Jésus. Redécouvrons cette présence aimante et fidèle de Dieu dans nos vies.
Le grand malheur de l'humanité, c'est l'incrédulité, c'est le manque de foi, c'est de ne pas reconnaître Dieu secrètement présent au milieu de nous.
Nous en connaissons les conséquences : violences, corruption, exploitation ; technicisation à outrance de la vie, affaiblissement des relations de qualité, repli sur soi, rejet des autres. Le contraire de la joie. Le contraire du projet d’amour de Dieu pour notre monde.
En revanche la joie est décuplée quand nous savons nous approcher du frère ou de la sœur en humanité qui avait perdu sa joie, sa dignité, son courage à vivre.
Ne vous est-il pas arrivé comme à moi de passer des périodes de tristesse ? … quand jaillit devant vous un défi à relever, une personne qui compte sur vous, et alors notre cœur se réchauffe de plus belle, notre énergie chasse la léthargie, notre esprit, nos mains s’activent… à ces moments-là, nous sommes dans la joie, la grande joie. Oui, la charité, la fraternité communiquent la joie de Dieu dans la réciprocité des relations à cœurs battants.
Bientôt dans son berceau de fortune, Jésus sera déposé sur le monde, il nous susurre à l’oreille : « Il n’y pas de plus grande joie que de devenir avec moi, le frère, la sœur d’un grand nombre. »
Ami chrétien, ne nous laissons pas voler notre JOIE ; et surtout, ne la perdons pas nous-même. Amen