Le pape a présidé, dans la soirée du vendredi 3 avril, la traditionnelle Via Crucis, dont les méditations traitent de multiples souffrances contemporaines mais aussi de sources d’espérance. Le texte, signé de Mgr Renato Corti, fait parler Jésus à la première personne...
« Les soldats du gouverneur m’entourent. Pour eux, je ne suis plus une personne, mais une chose. Ils veulent se jouer de moi, se moquer de moi. (..) J’ai déjà perdu beaucoup de sang » Les méditations du Chemin de Croix du Vendredi Saint,de ce vendredi 3 avril, font parler Jésus à la première personne du singulier.
Ces « sentiments et pensées de Jésus » jalonnent chacune des quatorze stations et donnent une tonalité personnelle et directe au texte écrit par Mgr Renato Corti, qui à la toute fin fait aussi parler Marie. L’évêque émérite de Novarre (diocèse du Piémont, en Italie), qui prêcha une retraite de Carême à la Curie sous Jean-Paul II il y a dix ans, s’est vu confier par le pape François les méditations pour cette année de la Via Crucis, qui se tient traditionnellement au Colisée, théâtre de persécutions chrétiennes dans l’Antiquité.
Droit à la liberté religieuse
Mais ce sont les persécutions contemporaines que met en avant Mgr Corti. La deuxième station fait ainsi entendre les paroles de Shahbaz Bhatti, ministre des minorités au Pakistan, qui fut tué le 2 mars 2011. Son témoignage est suivi d’une prière demandant « que le droit fondamental à la liberté religieuse se répande dans le monde ».
Plus loin, à la station où Jésus est dépouillé de ses vêtements, la méditation énumère « des situations terribles » touchant les plus jeunes : « Le trafic d’êtres humains, la condition des enfants-soldats, le travail qui devient esclavage, les enfants et les adolescents dépossédés d’eux-mêmes, blessés dans leur intimité, profanés de façon barbare. »
En résonance à cette actualité, la croix cette année doit être portée, notamment par des religieuses dominicaines irakiennes, par des franciscains de Terre Sainte et par des fidèles venus de Syrie, du Nigeria, d’Égypte et de Chine.
Peine de mort
Le fléau mondial de la peine de mort, régulièrement dénoncé par l’Église, est aussi rappelé au cours de ce chemin de croix. « Quand sera abolie la peine de mort, pratiquée encore aujourd’hui dans 58 États ? », questionne Mgr Corti, dénonçant aussi « toute forme de torture et la suppression violente de personnes innocentes ».
Au-delà de l’actualité brûlante, les méditations évoquent des souffrances plus sourdes ou enfouies comme les « drames familiaux dans le monde » (4e station). Alors que ce Chemin de Croix se déroule entre deux Synodes sur la famille, Mgr Corti indique : « Il est facile de juger mais il est plus important de nous mettre à la place des autres et de les aider autant qu’il est possible. » De manière symbolique, la croix, poursuivant son parcours autour du Colisée, doit être portée un moment par des familles.
« Incommensurable est également la souffrance de ceux qui connaissent des événements cruels, des paroles haineuses et fausses ; ou qui rencontrent des cœurs de pierre provoquant des larmes et conduisent au désespoir », est-il évoqué à une autre station, renvoyant ici aussi à d’innombrables souffrances personnelles.
« Génie féminin »
Mais la souffrance ne sert pas de seul fil conducteur de cette Via Crucis. Certaines méditations ont un ton plus lumineux, comme celle rendant grâce, à partir de l’épisode où Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix, à tous les « Cyrénéens » que chacun croise.
Une autre, à la station où Véronique essuie le visage de Jésus, loue « le génie féminin » : « Dans les Évangiles, les femmes ont une place importante », est-il rappelé en écho aussi à des propos répétés du pape François sur le sujet : « L’annonce de la foi dans le monde, et le chemin des communautés chrétiennes, sont très soutenus par les femmes. »
Ailleurs, le texte sur les souffrances des enfants rappelle, juste avant, la grâce du baptême. « Nous penser nous-mêmes comme fils est un don merveilleux dont nous te sommes éternellement reconnaissants », est-il invoqué dans une prière à la fin d’une autre station.
Empruntant maintes citations bibliques, le texte de Mgr Corti est aussi étoffé d’extraits des pères de l’Église mais aussi de Giovanni Montini, futur Paul VI, du cardinal Ratzinger, futur Benoît XVI, et du cardinal jésuite, Carlo Mario Martini, dont l’auteur fut un proche collaborateur.
La Via Crucis doit s’achever par une brève allocution du pape François, qui suit le parcours de la croix depuis le Palatin.