Homélie du 3e dimanche du Carême B
Qui donc est cet homme ?
Le geste volontairement agressif de Jésus a dû provoquer dans toute la ville de Jérusalem un véritable remue-ménage. Dans les rues grouillantes de pèlerins, la même question a dû courir sur toutes les lèvres : qui donc est cet homme pour oser expulser du temple marchands et changeurs de monnaie ? Et ce qui était encore curieux, c'est que Jésus n'était ni autorité juive, ni autorité civile ou administrative, ni police attachée au service du Temple. Aux yeux de la population, Jésus n'était qu'un simple laïc, un obscur charpentier issu d'une famille sans renom. Alors de quel droit pouvait-il donc se permettre d'agir ains i?
Le geste de Jésus est provocateur
Pour comprendre la scène décrite par l'évangile de ce jour, il faut se rappeler ce qui se passait au temple, surtout lors de la célébration de la fête de Pâques. A l'occasion de cette festivité qui était la plus grande solennité du peuple juif, des milliers de pèlerins, provenant non seulement de la Palestine mais de toutes les régions de l'empire romain, envahissaient la ville de Jérusalem. Chacun devait, selon ses possibilités, offrir des sacrifices d'animaux : des bœufs ou des agneaux ; les plus pauvres offraient des colombes... Il est évident que les pèlerins n'amenaient pas avec eux les bêtes à offrir, mais les trouvaient sur place dans la cour extérieure du temple, appelée la cour des gentils ou des païens. Marie et Joseph venant au temple au jour de la présentation de leur enfant se sont certainement réjouis de trouver dans le vestibule des marchands, pour acheter leurs deux colombes. En dehors du sacrifice d'animaux, les pèlerins devaient également payer une taxe pour le temple (Mt17,27). Or, les monnaies romaines et grecques que les pèlerins portaient avec eux ne pouvaient pas être versées dans le trésor du temple parce qu'elles étaient frappées à l'effigie des empereurs qui étaient considérés comme des païens. Il fallait donc les changer. Ainsi, la présence des marchands et des changeurs dans le vestibule du temple arrangeait tout le monde. Les marchands avaient leur compte et les changeurs réalisaient leurs petits bénéfices, avec la bénédiction des autorités civiles et religieuses.
C'est dans ce contexte de commerce à caractère religieux, que Jésus intervient pour chasser les vendeurs et les changeurs. Que nous enseigne-t-il en agissant ainsi ?
Redonner au temple sa dignité
En expulsant les marchands et les changeurs, Jésus voulait redonner au temple sa dignité et son caractère sacré. Le temple doit demeurer le lieu par excellence où l'on se rend pour rencontrer Dieu., l'adorer et le prier. Si le Christ s'est indigné, c'est bien parce que les préoccupations matérielles, les "bruits d'argent" dans le lieu saint et les spéculations ont fini par transformer la maison de Dieu en un « centre d'affaires » bien prospère. Parfois je me demande ce que dirait le Christ s'il se rendait aujourd'hui dans certains de nos sanctuaires. Que ferait le Christ aujourd'hui en entrant dans notre Eglise qui vit des heures sombres, qui est éclaboussée par des situations troubles. Oui que ferait Jésus en entrant dans cette église constituée des pierres vivantes fragiles que nous sommes ?
En réponse à ceux qui réclamaient un signe pour justifier pourquoi il a dégagé les marchands et les changeurs du temple, Jésus répondit : " détruisez ce temple et en trois jour je le relèvera i". Ce disant, il nous rappelle qu'il est le véritable temple du Dieu vivant. C'est en lui que nous devenons fils dans le Fils. C'est en sa personne que se révèle à nous le vrai Dieu.
Pour rencontrer Dieu son Père, Jésus se mettait à l'écart pour prier. Comme Lui, nous aussi nous devons rencontrer Dieu notre Père, dans notre pensée, dans notre cœur. Et cette rencontre ne se fera pas que dans une église, mais dans le sanctuaire de notre cœur.
A chacun de faire une place à Dieu et l'accueillir comme son hôte. Amen