31ème DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE C
Zachée : il est bien connu des enfants du catéchisme… ils l’aiment bien, il est petit comme eux ; il est leste comme eux sur son arbre et Jésus s’invite à manger chez lui comme les enfants aiment quand quelqu’un vient manger à la maison ; car c’est la fête.
Aujourd’hui, il me plaît de faire le lien entre Zachée et Jésus mais d’une autre façon ; car finalement tous les deux nous révèlent le secret de leur cœur alors qu’ils sont sur le bois.
Zachée sur le bois de l’arbre, un sycomore ; Jésus sur le bois de la croix.
Sur l’arbre, Zachée révèle qu’il est seul, qu’il n’a personne pour l’accepter parmi la foule et à plus forte raison au premier rang ; toute la population s’en méfie : il est collaborateur, chef des collecteurs d’impôts et voleur de surcroit… Quand Jésus passe, on le laisse derrière, au fond… il est le mal-aimé. Alors seul, il se débrouille et grimpe sur le sycomore.
Sur l’arbre de la croix Jésus révèlera son grand amour pour tous les hommes et pour tous les crucifiés de la vie, pour, justement, tous ceux que l’on met derrière, caché, exclus ; il fait mourir cette haine en la clouant sur le bois. L’arbre de la croix devient alors étreinte pour nous tous.
Et en cet instant à Jéricho… Zachée est en haut, Jésus est en bas ; Zachée est en haut parce qu’il cherche à voir qui est Jésus : cette curiosité est le début de sa rencontre profonde avec Jésus puis de sa conversion, de son changement de vie.
Jésus est toujours en bas, il est le très-bas pour se mettre à la portée de l’homme, de tout homme, même du plus minable. En Jésus, c’est Dieu qui se penche sur chacun de nous. … il aurait pu passer son chemin ce jour-là à Jéricho. Non ! Jamais Jésus ne fait ainsi ; il se met toujours au niveau de l’homme et s’en fait le compagnon ; oui, le compagnon pas le maître… et plus que cela, le sauveur et non le juge… « Le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. » c’est la dernière phrase de l’évangile d’aujourd’hui.
Finalement c’est dans la rencontre de ces deux hommes que tout s’est joué, que tout fut révélation.
Face à Jésus qui avait levé la tête et fixé son regard d’amour sur Zachée, ce dernier a découvert que la richesse de sa vie n’était pas dans ses biens matériels et dans son compte en banque… mais que sa richesse c’était lui-même, pour lui-même, capable de partage : une réelle conversion s’est produite alors : il change concrètement de vie en donnant aux pauvres et en réparant les tords qu’il a fait subir aux autres. Sa vie a pris un sens nouveau.
Face à Zachée qui le reçoit à sa table Jésus aussi découvre quelque chose : il découvre l’hostilité des bien-pensants qui le critiquent « il est allé loger chez un homme qui est pécheur… » et il réintègre Zachée parmi les croyants : « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham. »
Cela se passait donc à Jéricho.
Et si la suite se passait à Jérusalem, plusieurs mois plus tard, sur la colline du Golgotha : cette fois-ci, c’est Jésus qui en haut, sur l’arbre de la croix ; et j’imagine Zachée en bas qui lève les yeux vers celui qui a changé sa vie et ses comportements.
Deux regards silencieux qui se croisent, regards de tristesse et d’effroi et pourtant regards d’amour. Puis ce déclic dans l’esprit et le cœur de Zachée : « Lui qui a dit « le Fils de l’Homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu » est sur le point de mourir : lui qui a tant aimé et sauvé ne peut pas mourir pour toujours. Tant d’autres fils d’Abraham comme moi ont besoin de sa vie et de son action bienveillante ! »
Et devant l’homme Dieu pendu au bois de la croix, sans vie, Zachée, bouleversé, attend, persuadé que le Christ d’une manière ou d’une autre, tôt ou tard, descendra de cet arbre pour venir habiter dans la maison intérieure de tout être humain, actualisant sans cesse ses paroles : « Le salut est arrivé pour cette maison. » Zachée veut voir ce jour, il veut en être le témoin et l’annonciateur.
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Et nous ?
Etre chrétiens n’est-ce pas être témoin de la rencontre du Christ avec les hommes de ce temps ?
Cela se réalise quand nous nous rendons proches des autres, de tous ceux qui cherchent le Christ Jésus, de tous ceux qui, finalement, aspirent à autre chose qu’à ce qu’ils vivent. Et notre proximité peut devenir en eux la voix du Christ qui leur dit :
« Zachée, Jean-Luc, Maryse, Kévin, Chloé, descends vite… aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »
A notre contact, les hommes, les femmes, les enfants, les personnes âgées, les pauvres, les étrangers découvriront-ils ce dont ils sont capables ? Leur dirons-nous que nous avons besoin d’eux pour modeler l’aujourd’hui et le futur de l’Eglise et de la société ?
Quand le Christ passe et s’arrête… la vie surabonde, les vivants découvrent la plus belle facette de leur vie et de leurs capacités.
Quand nous passons et nous arrêtons… nos contemporains aussi revivent. Notre rôle auprès d’eux est essentiel.
Avec nous, grâce à nous, le Seigneur passe.
Sa gloire, ce n’est pas sa puissance qui écrase,
sa gloire, c’est l’homme vivant.
AMEN.