QUATORZIEME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE B
Les lectures de ce jour, Parole de Dieu, ont une tonalité plus grave que celles de dimanche dernier :
Le prophète Ézéchiel sait qu’il va au-devant des contradictions (première lecture),
Jésus connaît l’échec dans son propre village (évangile)
et Paul raconte comment il a été humilié d’une « écharde dans sa chair. »
Ces lectures peuvent nous aider à accepter, humblement et avec confiance, nos fragilités car « lorsque je suis faible, c’est alors que, avec Jésus, je suis fort » conclut saint Paul.
Mettons le focus sur Jésus :
Une cruelle déception l’attendait dans son village. Quel contraste avec les foules qui le pressaient de toute part, sur le chemin conduisant à la maison de Jaïre dimanche dernier !
Pourtant les Nazaréens sont nombreux à venir écouter l’enfant du pays dans la synagogue… vous savez comme lorsque le nouveau jeune prêtre revient dans sa paroisse pour sa première homélie… Mais ce jour-là à Nazareth les villageois en sont restés à une curiosité sceptique, puis à une hostilité et enfin à pure et simple rejet. Ils connaissent trop bien Jésus, du moins le croient-ils…
On peut les comprendre. Jésus, pour ses proches, n’est rien d’autre que « le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon, dont les sœurs sont ici chez nous ». Et voilà que, d’un seul coup, le menuisier du village quitte son métier et sa famille pour se mettre à prêcher par monts et par vaux.
Finalement, les habitants de Nazareth ont été incapables de reconnaître Dieu dans l’humilité de l’homme Jésus, son appel dans la voix d’un homme qui semble être « trop et uniquement » homme.
Le Sauveur se propose avec douceur et humilité et ne s’impose pas. Le Fils de Dieu se révèle dans la pauvreté et la simplicité de son être un homme comme un autre, et pourtant il est lui-même Dieu, dont la présence doit être reconnue dans les situations ordinaires de la vie, dans la vie quotidienne, dans le visage de chaque homme ou femme, pour lesquels il s’est incarné.
Lorsqu’on nous parle de quelqu’un, on a le fréquent réflexe de dire : on connaît. Or c’est faux. On ne connaît jamais pleinement une personne humaine. Elle est toujours, pour une part, un mystère qui nous dépasse. On peut décrire son aspect physique, préciser son métier, sa situation sociale et familiale, connaître ses habitudes, ses qualités et ses défauts. Mais tout cela n’est que l’extérieur de sa personnalité. On connaît ? Non, on croit connaître.
Les gens de Nazareth auraient pu se dire : « Ce Jésus qu’on croit connaître, qui est-il, au fond ? »
Mais pas du tout ! Ils campent dans leurs certitudes : « Jésus, on connaît. »
Au lieu d’une attitude ouverte à la nouveauté, ils se sont fermés à Jésus qui, subitement, se présentait totalement différent de celui qu’ils croyaient connaître.
Cela nous ramène à nous-mêmes. « Jésus ? Je connais. » Ne nous est-il pas arrivé d’avoir une telle réaction ? On a été au catéchisme, depuis notre enfance nous en avons entendu parler, de Jésus de Nazareth. On a lu les évangiles, on va à la messe, et on connaît les principaux épisodes de sa vie, on le prie, on en parle… Donc, on croit le connaître.
Mais l’avons-nous vraiment rencontré ? Avons-nous cherché à mieux le connaître, à le fréquenter dans la prière, dans la lecture lente et méditée de l’évangile, et dans le partage avec nos frères ?
Voulons-nous devenir l’ami de Jésus ; d’une amitié vraiment personnelle ? La rencontre de Jésus, c’est toujours l’émerveillement d’un amour toujours neuf.
Nous voici donc interpellés, nous qui sommes du pays, de la famille, de la maison de Jésus, de sa parenté, nous qui sommes ses frères et sœurs par le baptême.
Ainsi on peut dire que nous sommes chacun ce petit sanctuaire où Jésus vient, comme chez lui, nous visite et nous donne sa Parole vivante.
Au plus profond de nous-mêmes, nous devons l’accueillir et nous laisser bousculer, déplacer, étonner par la nouveauté de son message et de sa vie en nous. Car en nous et par nous il peut faire des merveilles ; sauf si nous lui fermons la porte.
N’attendons pas des miracles qui tomberaient du ciel à la façon Hollywoodienne ; croyons aux miracles ordinaires que Jésus fait en nos cœurs s’ils sont remplis de foi.
La synagogue de Nazareth, c’est aussi toute personne que nous croisons et qui est une demeure du Christ ; on l’oublie souvent ; alors s’installe l’indifférence voire le rejet de l’autre.
Aimons la rencontre entre nous, laissons-nous étonnés par celui ou celle qui est différent, différente. Apaisons les relations familiales et sociales et même paroissiales. Ecoutons avec de parler.
N’ayons pas peur de nous laisser changer, renouveler par les rencontres que nous faisons. Sinon nous chassons bel et bien le Christ de chez nous.
Ce « davantage » que nous devons introduire dans la normalité de la vie est capital pour le chrétien, la chrétienne que nous sommes. N’étouffons pas l’étonnement avec les préjugés de la normalité.
Gardons la capacité de nous émerveiller de ce qui fait la nouveauté de l’autre et même de sa capacité à changer, à se renouveler si besoin. Ne l’enfermons pas dans nos idées toutes faites.
Accueillons avec gratitude et humilité Jésus, et nos frères et nos sœurs, et nous-mêmes dans nos faiblesses et nos pauvretés, comme le jour nouveau d’un matin de lumière.
Amen