Témoignage lors de la veillée de prières pour la paix au Pays Basque
... " car, voyez-vous, ces terroristes ont tous une mère..."
" Il y a un peu plus d'un an, en janvier 2015, nous célébrions dans cette église Saint Vincent, l'Eucharistie au cours de laquelle l'abbé Duhart nous faisait ses adieux, partant pour la retraite.
Lors de la prière universelle de ce jour, nous avions prié de façon particulière pour les victimes des attentats du 7 janvier à Paris et leurs familles. Aucune mention fut faite conc ernant les terroristes, ni leurs parents, plus exactement, leurs mères.
Le dimanche suivant, j'assistai comme d'habitude à la messe dans l'église de Biriatou et j'ai pu exprimer à l'abbé Jean-Marc mon étonnement à ce sujet. Je le remercie, aujourd'hui, de me permettre de m'exprimer librement et de vous apporter mon petit témoignage.
Pour moi, il ne s’agissait même pas de demander à Dieu notre Père de pardonner les terroristes. J’aurais simplement voulu que nous demandions au Seigneur d’apporter un peu de soulagement et de sérénité dans le cœur de toutes ces mères qui ont vu leurs enfants devenir des assassins. Car, voyez vous, ces terroristes ont tous une mère. Une mère qui n’aurait jamais pensé que son fils, qu’elle avait tant et tant aimé, puisse un jour tuer, et, qui plus est, être à son tour, tué par les forces de l’ordre. Imaginons un seul instant un de nos enfants kalashnikov à la main, ou ceinture d’explosifs autour de la taille …. Cette vision nous est, j’en suis sûre, insupportable à tous, ici présents.
Si je suis arrivée à cette réflexion, c’est surtout grâce au témoignage entendu et vu à la télévision, le 12 ou 13 Juillet 1997 lors de la séquestration et assassinat de Miguel Angel Blanco …. Parmi tant de personnes qui demandaient publiquement, à travers les radios et les chaînes de télévision, la libération du séquestré ; il s’agissait d’une femme d’environ 40 ans dont le frère, membre présumé de l’ETA, était en prison avec une lourde peine à accomplir. Cette femme, d’une voix émue mais ferme a dit : Je suis disposée à ne plus voir mon frère sortir de prison pourvu que Miguel Angel Blanco soit épargné de la mort. Ces propos m’ont profondément marquée et j’ai pensé que cette personne était généreuse : d’une certaine façon, elle troquait sa volonté, son désir de revoir son frère sortir de prison, contre la liberté d’un innocent qui allait perdre la vie, assassiné.
Son témoignage et mon propre cheminement dans la foi m’ont été d’un grand enseignement pour essayer de ne pas oublier la souffrance des autres.
Je faisais alors partie du mouvement citoyen « Gesto por la paz » (un geste pour la paix). Lorsque un attentat était commis, notre groupe se rassemblait pendant 15 minutes, dans un silence total, devant une pancarte avec pour seule enseigne : GESTO POR LA PAZ - DIS-LE AVEC TON SILENCE. Le silence exprimait la douleur pour le ou les morts, la réprobation pour les assassins et certainement la compassion pour les familles endeuillées. Puis, un jour, un jeune, terroriste présumé, est mort en manipulant un engin explosif qu’il essayait de placer sous un véhicule…. Ce jour-là, pour la première fois, après il y en eut quelques autres, nous nous sommes rassemblés pour dire avec notre silence que le jeune, mort en essayant de tuer, si terroriste fut-il, était un mort de trop, encore un mort de trop, parmi les dizaines de personnes disparues au nom de la paix en Pays basque….
Dans notre foi de chrétiens, il nous faut ne pas oublier que nous sommes frères de tous les hommes. Si Dieu notre père nous aime sans condition aucune, nous ne pouvons pas, nous, laisser de côté ceux qui souffrent parce que leurs enfants sont cruels et dépourvus de cervelle, seulement parce qu’ils sont hors la loi et dépourvus de tout sentiment humanitaire.
Prenons donc pitié de toute souffrance humaine ; une mère et un père dont l’enfant est un terroriste portent un fardeau de douleur infinie ; j’en suis sûre : j’ai trois enfants.
Hondarribia-Hendaye - 11-04-2016 - Marian AGUESSE-MAULEÓN
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Pour tous, et plus particulièrement pour toutes les mères,
traduction du chant pour la Paix de Peio Ospital,
chanté lors de la veillée
Bake mina "Le mal de paix"
L'humanité est en mal d'amour,
la nature en mal de soin.
L'immigré a le mal du Pays,
ce Pays est en mal de Paix.
Paysans ou ouvriers,
croyants ou en recherche,
par nos routes et nos rues,
soyons des acteurs de Paix.
La division génère le découragement,
tandis que l'union est porteuse d'espérance.
La haine engendre la souffrance,
tandis que le pardon est libérateur.
La voix du dialogue, du rapprochement,
de l'amour, de la libération,
de la justice et de la paix
sont toutes des voix de bonheur.
L'humanité est en mal d'amour…
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