« ... le premier de ces miracles est la conversion de toute l’île de Futuna peu après sa mort, conversion qui a été reconnue comme un acte relevant du divin, surtout quand on prend en compte le fait que Musumusu, son meurtrier, s’est converti et est devenu le plus zélé des dévots. »
Basilique Saint Pierre Chanel - FUTUNA
« Fils de modestes paysans de la Bresse, près de Lyon, rien ne prédisposait Pierre Chanel à devenir le saint patron de l’Océanie.
A 37 ans, mourant sous les coups d’une bande de guerriers sanguinaires sur l’île de Futuna, il entra dans l’Histoire par la grande porte, celle des martyrs, son assassinat entraînant la conversion rapide et sincère de toute l’île.
Sa vie de missionnaire fut courte, moins de quatre ans dans le Pacifique Sud, mais elle fut en tous points exemplaire…
Né le 12 juillet 1803, le petit berger du hameau de Cuet, à sept ans, s’applique à une seule chose : ne pas égarer une de ses bêtes. Ses parents ne sont pas riches et tout le monde “trime dur” dans la famille, car avec huit enfants à charge, le papa, Claude-François Chanel, et la maman, Marie-Anne Sibellas, n’ont guère de temps à perdre.
Pierre, cinquième enfant de la famille, sait qu’il doit veiller sur le troupeau et ramener pour la traite, à la ferme de la Potière, chaque fin d’après-midi, les quelques têtes de bétail dont il a la charge.
En fond sonore, l’enfant entend les cloches de la commune toute proche de Montrevel-en-Bresse rythmer ses journées. Pendant cinq ans, elles lui donneront l’heure.
Souvent aux champs, le petit Pierre n’est pour autant pas un illettré.
La découverte des missions
Pierre Chanel va à l’école, quand il peut, à Saint-Didier-d’Aussiat, où, grâce à l’abbé Camus, il fait connaissance avec le père Trompier, curé de Cras-sur Reyssouze, village voisin. Celui-ci détecte, dans ce jeune enfant réservé, un rien timide, du potentiel ; il propose à ses parents de l’emmener à l’école de Cras, ce que fit Pierre à la rentrée 1814. Il avait alors 13 ans. Il était doué, apprit vite et fit sa première communion le 23 mars 1817.
A cette époque, il découvrit des lettres, celles de Monseigneur Dubourg, rentré d’Amérique et racontant son travail de missionnaire. Il fut fasciné, subjugué. "C'est l'année où je formai le dessein d'aller dans les missions lointaines."
En 1820, le brillant élève entra au petit séminaire de Meximieux (dans l’Ain), puis, en 1823, au grand séminaire de Brou, au chef-lieu, Bourg-en-Bresse. Latin, grec, théologie, Pierre était toujours aussi brillant et fut ordonné prêtre le 15 juillet 1823 ; il pris ses fonctions de vicaire à Ambérieu-en-Bugey, puis devint curé de Croset.
Le Pacifique en vue !
Dévoué à sa foi, Pierre voue un culte à Marie et décide d’entrer dans la Société de Marie en 1831. Les maristes sont d’ardents et actifs missionnaires et dans sa petite tête, Pierre Chanel meurt d’envie de partir pour les lointaines Amériques. Mais de mission, point : il se retrouve bloqué cinq années au petit séminaire de Belley, enseignant de 6e, directeur spirituel, économe et vice supérieur de l’établissement, malgré son jeune âge.
Jusqu’en 1836, il reste à Belley où il est si apprécié qu’il a bien peur de ne jamais pouvoir partir…
On dit que l’histoire ne présente pas les plats deux fois. Pierre sut saisir sa chance quand Mgr. Pompallier, évêque à Auckland, vicaire de l’Océanie orientale, frappa à la porte de la Société de Marie pour recruter des volontaires. Destination, le vaste Pacifique.
Chanel se porta candidat, plutôt deux fois qu’une, et se retrouva embarqué au Havre le 24 décembre 1824. Avec deux autres missionnaires, ils furent débarqués dix mois plus tard, le 8 décembre 1837, sur la petite île de Futuna (Mgr. Pompallier poursuivant jusqu’à Auckland).
Une protection royale
Surprise du Bressan, les “sauvages” leur font bon accueil. Personne ne comprend rien à ce qu’ils racontent, ni à ce qu’ils font, mais visiblement, ce ne sont pas de dangereux envahisseurs.
Les missionnaires baptisent les mourants, soignent les blessés et parlent - dans un Futunien encore très approximatif-, d’un curieux dieu, leur maître dans les cieux.
Le principal roi de l’île, Niuliki, les prend sous sa protection, d’autant que les missionnaires jouent les diplomates et tentent de pacifier les tribus en guerre permanente entre elles.
Seul bémol, les religieux font tout pour faire cesser le cannibalisme, alors que le “cochon long” est un mets de qualité…
“L’homme à l’excellent cœur”, comme est surnommé Chanel, finit toutefois par faire de l’ombre au capricieux monarque : toutes ces conversions lui semblent éloigner ses sujets de son autorité. Il se fâche et coupe les vivres aux missionnaires, qui vont alors connaître la faim et le dénuement, malgré l’aide de leurs ouailles.
Ils plantent, pour survivre, mais leurs ennemis déterrent, saccagent, pillent leur jardin.
Roué de coups et achevé
Affamés, les pères en sont réduits à tuer leur chien pour le manger ! Les menaces de mort se font plus précises, mais Chanel, serein, répond : "La religion est implantée dans l'île, elle ne s'y perdra point par ma mort, car elle n'est pas l'ouvrage des hommes, mais elle vient de Dieu."
Le prêtre ne croit pas si bien dire… Car pour Niuliki, la coupe déborde lorsque son propre fils annonce publiquement sa conversion.
Au matin du 28 avril 1841, le roi envoie son gendre, Musumusu, et une troupe armée pour en finir. Deux des trois prêtres sont absents, Chanel est seul : agressé verbalement, il est ensuite roué de coups dans son jardin ; après la bastonnade, les Futuniens pillent la maison des pères ; dehors, Chanel respire encore faiblement. Musumusu l’achève alors d’un violent coup d’herminette sur la nuque.
Le miracle de la conversion
Leur forfait accompli, les agresseurs fuient, conscients d’avoir commis l’irréparable. Le fils du roi et tous les convertis manifestent leur dégoût et leur tristesse. Grâce à cette indignation populaire, les deux autres missionnaires deviennent en quelque sorte “tabu” ; loin de s’avouer vaincus, ces derniers multiplient leurs prêches et les Futuniens, comme des dominos, embrassent tous très vite la nouvelle religion. Même
Musumusu se convertit. Rongé par le chagrin, il demande à être enterré après sa mort à côté du Père Chanel. Niuliki est vaincu, d’autant plus que sa fille devient la première religieuse futunienne. Cerise sur le gâteau, la population crée même une danse en mémoire de Chanel.
C’est gagné pour les maristes : Futuna est chrétienne, Futuna est catholique, au prix d’un martyr qui deviendra le saint patron de l’Océanie… »
Rédigé par Daniel Pardon le Dimanche 23 Octobre 2016 à 09:21 | Lu 3569 fois (au 21 avril 2021)
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Pour visiter la basilique et les îles de Futuna et Wallis !